MEMORANDUM DU PARTI « URUNANI RW’IMVUGAKURI-ADR » SUR LA SITUATION SOCIO POLITIQUE, ECONOMIQUE ET SECURITAIRE QUI PREVAUT DANS LE PAYS

MEMORANDUM DU PARTI « URUNANI RW’IMVUGAKURI-ADR » SUR LA SITUATION SOCIO POLITIQUE, ECONOMIQUE ET SECURITAIRE QUI PREVAUT DANS LE PAYS

Au regard de la situation alarmante qui prévaut dans le pays, le Parti « URUNANI RW’IMVUGAKURI-ADR » a décidé de rendre publique sa position sur les questions essentielles du moment.

Quiconque observe la scène politique burundaise remarque que le parti ADR ne monte pas tous les matins sur le toit pour attaquer le Gouvernement, pour dénoncer tout ce que ce dernier entreprend, pas plus qu’il ne pousse l’opinion à la vindicte populaire des dirigeants qui se sont transformés en bourreaux du peuple dont ils ont pourtant la charge. Ce ne sont pourtant pas les griefs qui manquent à charge du pouvoir de Bujumbura. Loin de là.

L’attitude de l’ADR est dictée par le souci de ne pas mettre de l’huile sur le feu dans ce pays qui se consume, de ne pas répondre à l’irresponsabilité des dirigeants par celle de l’opposition.

Il est conscient qu’il y a une autre façon de faire l’opposition que de s’inscrire aveuglément dans le jeu de la provocation-répression. Par cette démarche, ce parti s’impose ce qu’il ne manquera pas d’imposer à l’opposition le jour où il sera le gouvernement. Le gouvernement gouverne dans l’intérêt de la nation et le respect de la loi, l’opposition fait l’opposition dans l’intérêt de la nation et le respect de la loi.

Les griefs à charge du pouvoir de Bujumbura ne manquent pas. Face à la situation qui prévaut dans le pays, le parti ADR n’a pas seulement le droit de réagir, il a le devoir de s’exprimer.

L’ADR ne pourrait pas taire quand la paix sociale et la sécurité sont gravement troublées, quant l’économie est ravagée, quand la morale publique est ruinée, bref quand l’espoir face à l’avenir est hypothéqué.

Dans le domaine social

Voici des mois que les services de la santé publique sont en arrêt. Et le gouvernement est tranquille, il trinque, il voyage et prend des vacances.

Est-il normal de refuser le minimum aux médecins dont on attend disponibilité et dévouement. Et ce au moment où le plus modeste des agents de l’Etat qui gère la caisse de celui-ci, soit parce qu’il est membre du parti CNDD-FDD au pouvoir ou soit parce qu’il a acheté le poste qu’il occupe, peut faire autant de prélèvements qu’il veut sans être inquiété.

Et dire que le même gouvernement, qui traite avec mépris et condescendance le corps des médecins et le personnel soignant, ne rate aucune occasion de déclarer qu’il « ne ménagera aucun effort pour assurer des soins de santé à toute la population ».

Qui aurait imaginé qu’il allait y avoir déstructuration des services de santé et pénurie généralisée des médicaments et insuffisance de personnel soignant sitôt après les déclarations pompeuses de gratuité des soins de santé.

Au moment où le pays attendait des gestes d’apaisement et des solutions à la crise des médecins de la part du Gouvernement, survient le discours belliqueux du Président de la République de ce 27 avril 2009. Il a martelé que les burundais ne sont ni des français, ni des américains et que les médecins ne sont pas les seuls dans le besoin. L’ADR dénonce une telle attitude de la part de la plus haute autorité de l’Etat. Il ne peut pas mettre en garde des fonctionnaires qui revendiquent l’égalité de conditions dans le travail, il ne peut pas proférer des menaces à l’endroit d’un corps parmi les moins bien rémunérés pendant que de vrais parasites gravitent au tour du pouvoir dans des conditions de confort choquantes. Il ne faut pas se le cacher : les médecins et le corps soignant sont indispensables et ont droit à des conditions de travail dignes. Ce n’est certainement pas l’intimidation qui va résoudre le problème.

Les naïfs pourraient croire que le bras de fer entre le Gouvernement et les enseignants a trouvé solution. Il n’en est rien, le conflit est tout simplement éclipsé par la paralysie du secteur de la santé. Le volcan n’est pas éteint, il n’est qu’endormi.

Comme si les improvisations et les initiatives malheureuses du Gouvernement CNDD-FDD n’avaient pas suffisamment traumatisé ce pays, l’idée de la gratuité de l’enseignement secondaire est annoncée.

L’ADR se demande quelle mouche a piqué le pouvoir CNDD-FDD pour l’inciter à paralyser davantage le monde scolaire ? Lui faut-il encore plus d’échecs ?

Les rapatriés et les déplacés, figurent sur la longue liste des laissés-pour-compte du système CNDD-FDD, et seul Dieu sait combien ils sont nombreux. Rien n’est fait en leur faveur, tandis que les terres, qui constituent l’enjeu permanent du burundais, sont prises d’assaut par les administratifs et les nantis des villes. Les promesses d’hier sont tombées dans l’oubli.

Et pour cause, ceux qui les faisaient hier sont servis. L’heure est à la désillusion des électeurs. Les populations alibis n’ont plus d’autre choix que de se débrouiller.

Il est malsain, sinon contre le bon sens, de forcer le rapatriement des réfugiés aux besoins desquels on ne pourra pas répondre.

Pour l’ADR, la raison commande de chercher la solution à ces masses de populations dans l’intégration sous régionale.

Dans ce pays qui vit au rythme des catastrophes naturelles, le Gouvernement brille par l’absence.

Dans le domaine politique et sécuritaire.

Le traitement fait aux partis politiques, aux acteurs de la société civile et des syndicats ne peut pas ne pas inquiéter.

L’emprisonnement sans jugement des opposants politiques, l’incarcération à durée indéterminée et sans jugement du Vice Président du Syndicat des Magistrats, Monsieur Juvénal RUDUDURA, et tout récemment l’ignoble assassinat dont l’impunité est garantie du Vice Président de l’OLUCOME, Monsieur Ernest MANIRUMVA en disent long à eux seuls sur l’idée que le parti CNDD FDD et ses alliés du gouvernement ont de la démocratie.

Le traitement inégal des partis politiques par l’administration fait scandale. Pendant que le CNDD-FDD est en campagne électorale, les autres parties politiques se voient interdits de tout jusqu’aux petites réunions. Ne parlons pas des manifestations publiques. L’accident d’un camion qui transportait les militants de ce parti de retour d’un meeting politique à Muyinga, ce samedi 25 avril, est un démenti cinglant aux mensonges du CNDD-FDD qui nie qu’il est parti en campagne électorale avant l’heure.

Les échéances électorales sont là, et le Gouvernement ne bouge pas, notamment pour la mise en place des textes légaux. Chose paradoxale et inacceptable, il se comporte comme si les élections étaient une affaire privée du CNDD-FDD dans laquelle il est prudent de ne pas mettre le nez.

Sur le plan de la justice, il est dorénavant plus facile d’obtenir un logement dans les prisons et les cachots que dans les quartiers. Et pour cause, la délation et la répression bénéficient de plus d’attention des pouvoirs publics que la construction de logements, l’extension du réseau de la REGIDESO et l’emploi.

Sur le plan de la sécurité, plus rien ne va malgré les discours d’autosatisfaction des dirigeants. Dans les médias, les annonces de meurtres et les arrestations arbitraires alternent avec les bilans administratifs positifs sur la paix et la sécurité dans les communes.

Le décalage n’est pas difficile à expliquer pour qui connaît le fonctionnement du pouvoir CNDD-FDD : ce pouvoir n’a de besoins que les bilans positifs ; les meurtres et les violations des droits de l’homme sont affaires des intéressés. Comme quoi, la vie des citoyens n’est pas une affaire de l’Etat sous le mandat CNDD-FDD.

Plus récente et beaucoup plus dangereuse sur le plan de la sécurité, la démobilisation ratée des FNL. Quel autre mobile, sinon le maintien du désordre dans le pays, pourrait être derrière le renvoi dans la nature de plus de dix mille combattants, rompus à l’art de tuer, sans leur assurer le moindre encadrement ni leur réserver la moindre assistance matérielle. C’est un crime pour un pouvoir de créer ou d’entretenir le désordre.

L’argument de l’absence de fonds ne tient pas. Il suffirait de voler moins, de s’amuser moins et de faire moins de tours du monde pour faire des économies. La paix en vaut le prix. La démobilisation du parti CNDD-FDD a été bien menée, il n’y a pas de raison que celle des FNL ne le soit pas.

Dans le domaine économique.

Le pays est en ruine. La famine fait des dégâts, pendant que le Président de la République bât campagne pour planter l’avocatier dans un pays où l’alimentation repose sur le haricot, le manioc, la patate douce, le maïs, l’huile de palme et le riz pour ne citer que ceux-ci.

Point de financement du café et du thé, dont les instruments de production sont obsolètes quand l’on sait leur place dans l’économie nationale. Les deux secteurs sont tout simplement plantés entre le délaissement de l’Etat et la privatisation qui n’aboutit pas.

Vivre d’un seul fruit, investir exclusivement dans le dessert, voilà le génie d’un gouvernement fier de sa trouvaille. Ce qui n’est pas dit dans ce pays où l’opacité dans la gestion des affaires publiques est la règle d’or, c’est l’origine et la gestion des fonds derrière cette plante miracle, l’avocatier. Mais une chose est certaine, la campagne avocatier est certainement rentable parce que les hommes qui nous gouvernement n’ont pas l’habitude de s’égarer dans des projets non rentables à eux.

Le drame de l’économie du Burundi d’aujourd’hui n’est pas seulement que son appareil productif est en arrêt. Il y a aussi, et surtout, ces dépenses inutiles.

Le charroi de l’Etat du Burundi serait gênant si les mots pudeur et mesure avaient encore de la place dans nos mœurs politiques, si le politicien burundais n’avait pas tué la culture de modération qui a porté et consolidé sa patrie. Les déplacements du Président de la République, de son Gouvernement, de l’Assemblée Nationale, du Sénat et des privilégiés de l’administration publique, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, coûtent trop cher à l’Etat, de par leur rythme et la générosité du trésor lorsqu’il est question de débloquer des frais de mission, de signer les bons carburants et autres avantages connexes.

Et ce pour rien, sinon pour les voyageurs, quant l’on sait qu’il n’y a pas de programmes économiques, qu’il n’y a pas d’investissements, qu’il n’y a pas de coopération digne de ce nom. Les promenades oiseuses des gens qui nous gouvernent nous coûtent trop cher.

Un mot particulier doit être dit sur les routes en réfection, réalisations entourées de flou.

Le Gouvernement n’a pas le toupet, jusqu’à présent, de dire haut que les routes que nous voyons ci et là dans le pays sont son œuvre.

La réalité est que le gouvernement est soigneusement tenu à l’écart de ces chantiers, parce que nos partenaires étrangers n’ignorent pas que les fonds qui seraient confiés à ce Gouvernement subiraient le sort du Fonds Carburant Nigérian et du Falcon 50, lequel était affecté aux déplacements du Président de la République mais s’est évaporé entre les mains qui en étaient gardiennes.

L’heureuse mise à l’abri de la réfection des routes n’empêche pas aux propagandistes du CNDD-FDD de murmurer dans les oreilles non averties, échéances électorales obligent, que le Gouvernement se tue à la tâche. Preuves supplémentaires que les politiciens qui nous gouvernent continuent à mettre le mensonge et la manipulation au service de la politique, convaincus qu’ils sont que politique rime avec mensonge.

Le mal CNDD-FDD a une origine, la confusion entre le parti CNDD-FDD et l’Etat, entre les rôles de l’un et de l’autre, entre les caisses de l’Etat et les poches des politiciens en charge de l’Etat.

Le peuple burundais aura compris que le CNDD-FDD et ses partenaires du gouvernement sont restés attachés avec détermination aux méthodes de gestion qu’ils dénonçaient hier avec acharnement.

Qui peut croire que l’Etat du Burundi est pauvre quand il voit les constructions pharaoniques de nos dirigeants qui, lorsqu’ils ont pris fonction, il n’y a pas quatre ans, n’avaient pas un franc dans la poche ?

L’enrichissement accéléré de nos dirigeants a pour origines les détournements et malversations de fonds publics, la fraude douanière et fiscale.

Le peuple burundais aura compris pourquoi l’obligation constitutionnelle de déclarer les biens avant d’entrer en fonction est tombée en désuétude. Comment voulez-vous que le Burundi ne sombre pas dans misère quand ses dirigeants ont le privilège de l’impunité, quand leur gestion échappe à tout contrôle et quand ils peuvent s’adonner corps et âme à la corruption.

Le comble dans cette histoire de corruption généralisée, c’est que les générations futures vont hériter de dettes qui n’auront servi à rien et dont l’ampleur reste un secret d’Etat.

Le peuple burundais aura compris que l’avenir de notre pays est hypothéqué par tant d’absence d’amour pour la patrie qui n’a d’égale que la soif des richesses de nos dirigeants.

Lorsque l’on s’interroge sur les raisons de la mauvaise gouvernance imposée à notre pays, l’on pourrait croire, de prime abord, que le Gouvernement actuel se comporte ainsi par incompétence et par inconscience. Ce serait une erreur. Ce serait une excuse facile.

Il y a pire que l’inconscience, il y a plus mal que l’incompétence. C’est le manque de patriotisme des hommes qui nous gouvernent, accompagné de cynisme, de cupidité et autres formes d’égoïsme. Le pourrissement observé dans notre pays est voulu, entretenu par le parti CNDD-FDD pour se maintenir au pouvoir.

Pourquoi, sinon, rien n’est fait pour chercher les solutions appropriées aux maux qui rongent notre pays. Le CNDD-FDD ne voit-il pas cela ?

Pourquoi rien n’est fait pour remettre la justice en marche, pour faire face au tribalisme qui couve sous la cendre et sera exploité au premier tournant.

Pourquoi le gouvernement ne réagit pas aux tracts tribalisant qui circulent en Belgique sur le remplacement du Gouverneur de Ruyigi. Ne les voit-il pas ?

Il voit tout cela mais pratique son art de se murer dans le silence lorsque cela l’arrange.

Pourrait-on trouver une explication au refus du Gouvernement de mettre en place la Commission « Vérité – Réconciliation », autre que la prévision de brandir les arguments ethnique et régionaliste lorsqu’il lui faudra s’expliquer sur ses échecs devant une opinion désabusée ?

Faut-il renoncer ? Jamais.

Le peuple burundais a droit à une place au soleil. Il a le droit d’être bien dirigé. Il a le droit d’être informé de la situation du pays au lieu d’être tenu dans l’ignorance.

Seulement, qu’il sache qu’il n’y arrivera qu’à force de se battre.

Et qu’il se rassure, aucun gouvernement n’a jamais gagné la guerre contre son peuple.

Pour sa part, le parti ADR- URUNANI RWIMVUGAKURI est engagé dans ce combat pour la dignité et la reconstruction nationales. Ensemble avec le peuple, il y arrivera.

Face à cette situation riche de tous les dangers,

Le Parti « URUNANI RW’IMVUGAKURI-ADR » exige du Président de la République et de son Gouvernement de :

1° Prendre au sérieux les problèmes des médecins et du personnel soignant et d’y apporter les solutions appropriées sans tarder.

2° Arrêter immédiatement la gestion aventureuse des affaires de l’Etat particulièrement le programme avocatier, dont il est aisé de sentir le profit personnel qui en est l’unique leitmotiv. Investir immédiatement dans la production des produits de grande consommation.

3° Assurer immédiatement la sécurité des personnes et des biens sur l’étendue de toute la République. Démissionner s’ils n’en sont pas capables.

4° Procéder à la démobilisation des FNL avec sérieux et sans arrière pensée, en y affectant les budgets nécessaires et en mettant en place les mesures d’accompagnement requises.

5° Mettre en place un programme sérieux de gestion des terres, une bombe à retardement avec laquelle le Gouvernement devrait cesser de jouer.

6° Mettre en place un programme de l’agriculture et de l’élevage au sein duquel l’alimentation de base soit une véritable préoccupation.

7° Préparer les élections sans tarder, vu le retard pris.

Fait à Bujumbura, le 27 avril 2009

La Présidente du Parti

Honorable Alice NZOMUKUNDA

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